Ça s’est passé comme ça. Les personnes qui se ressemblent se reconnaissent au premier regard. On s’est reconnus. On est partis en voyage. On est partis vivre à Berlin, à Paris, on est revenus à Barcelone d’où tout était parti, et qui est resté notre quartier général. On a commencé à écrire des livres ensemble. On en lisait, on en écrivait déjà un dans la vie, alors pourquoi ne pas le faire aussi sur papier ? On a inventé des métiers imaginaires comme quand on était enfants. On a suivi des jeunes pleins d’élan qui changent le monde sur tous les plans.
Sri Lanka © Julieta Cánepa
Puis on est repartis en voyage, en Asie, avec une question en tête : comment habiter autrement le monde ? Comment réinventer un accord avec la Terre et le monde vivant ? Comment voyager, marcher, vivre en harmonie avec les éléments ? On a jeté ces questions dans nos deux sacs à dos et on est partis. Il faisait beau, ce jour d’août 2019. Les départs sont toujours pleins d’une joie violente, qui explose au visage comme un matin d’été.
Exploration sensible du monde
On a plongé dans l’océan indien plein de tortues et de poissons, on a traversé la jungle de Sumatra, on a marché dans l’Himalaya, on a mangé des merveilles et croisé tant de regards. Plus on avançait, plus des questions surgissaient. On s’est dit qu’on pourrait en faire un livre. Il s’appellerait Je suis au monde et on plongerait avec lui dans le monde vivant pour essayer de le comprendre, de l’aimer encore davantage, de l’habiter et d’en faire partie d’une autre manière.
Lire un extrait en avant-première de Je suis au monde ici.
On rêvait d’une exploration sensible du monde. On a pensé : ce qu’il faut réinventer, c’est notre relation sensuelle et charnelle à la terre, à la mer, aux mille et un habitants de la planète, du ver à l’albatros. Lorsqu’on est immergés dedans, on se sent appartenir au monde, on comprend que l’on est une pièce dans un ensemble, que le monde vivant est un grand réseau dans lequel tout se tient, dans lequel chaque mouvement a son importance.
Si nous arrivons à sentir à nouveau le monde vivant, la caresse du palmier sur nos mains, le regard du paresseux sur sa branche, le pas de l’ours sur la glace et la force des flots marins, alors tout changera. La clef du problème, et de sa solution, se situe là. Nous nous sommes détachés du monde, nous devons trouver la manière de nous en rapprocher.
Double mouvement
Tout en explorant ces espaces naturels, on menait une réflexion plus générale. Comment fonctionne ce grand tissu du vivant ? Pourquoi la biodiversité est-elle menacée ? Que s’est-il passé au cours des derniers siècles pour que nous en arrivions là ? Comment parvenir à vivre toutes et tous en bonne entente ? Ce double mouvement nous a donné la forme du livre, dans lequel on alternerait immersions sensibles et réflexions. On s’est arrêtés souvent au cours de ce voyage, au bord de la mer ou au fond de la jungle, en haut d’une montagne, on s’est arrêtés et on a ouvert nos sacs, on en a sorti les carnets et l’ordinateur, on s’est mis à écrire.
© Stéphane Kiehl
Ecrire à deux est une autre aventure exaltante : ce sont deux corps et deux cerveaux qui s’augmentent l’un l’autre, une idée est lancée, quelqu’un l’attrape au vol, on la déplie, elle se transforme, l’une lui donne des mots et des couleurs, l’autre la réinterprète et la relance ailleurs, et ainsi de suite, de couches en couches, le texte se forme comme un mille-feuilles.
Voilà ce qui est passionnant dans l’écriture, en particulier à deux : tout est toujours à inventer.
Au bout de quelques jours ou de quelques semaines, on repartait. On a traversé ainsi le Népal, l’Inde, le Sri Lanka, la Thaïlande, la Birmanie, Sumatra et le Japon, entre plongées dans les villes, les montagnes, les campagnes et moments suspendus. On est revenus en avril 2020, parachutés dans un drôle de monde mais avec un livre dans nos sacs à dos, recouverts d’une couche de terre et d’éclats de soleil.
L’illustrateur Stéphane Kiehl s’est emparé de ces voyages pour en tirer de sublimes immersions dans les mers et les terres.
C’est ce livre que vous tenez entre les mains.
On est émus de vous le transmettre.
Nous sommes au monde, et c’est une aventure sans fin.
Julieta & Pierre
0 comentarios